Swans – To Be Kind : Du brio

Après avoir sorti le monumental The Seer en 2012, je pensais que ça allait être difficile pour Swans de sortir un album d’une telle ampleur sans tomber dans la redite, surtout après un truc aussi puissant que The Seer qui était un de mes albums favoris de 2012. Cependant, les armes musicales déployées dans Swans pour To Be Kind ne sont pas du tout les mêmes. Ce n’est plus juste le fait de maraver la race de l’auditeur avec des murs de sons tonitruants, non … maintenant, on part carrément dans l’hypnose.

tobekindL’évolution principale de To Be Kind, c’est que cet album est beaucoup plus lumineux, avenant, que son prédécesseur. Il y a des éléments plus fantasques, mais il en découle une ambiance très colorée, notamment dans des morceaux comme A Little God in My Hands, qui est totalement déjantée dans son instrumentation, avec ces ensembles de cuivres qu’on croirait sortis d’un cartoon avec des gangsters machiavéliques et comiques à la fois. Et cette fantaisie se retrouve pas mal dans l’aspect possédé du chant de Michael Gira, totalement en roue libre de la manière la plus libératrice qui soit.

Puis y a un aspect rythmique a prendre en compte, c’est le groove infectieux qui découle de la plupart des morceaux, qui rend les pans de sons de Swans encore plus percutants, notamment dans l’Opener Screen Shot ou dans Oxygen, et quand ils sont produits avec autant de précision, on se rend compte de l’ampleur du travail poussé dans cet album. Et arriver à sortir un album aussi techniquement poussé 2 ans après en avoir fait un avec la même exigence … ça ne peut que s’applaudir, et à l’écoute de ce mastodonte de 2 heures, on en sort avec la bouche sèche, des palpitations, mais l’envie d’y retourner.

C’est pas un album facile, mais l’exigence en vaut totalement la chandelle, car si les morceaux se tirent en longueur (She Loves us! fait 17 minutes, Bring The Sun/Toussaint l’ouverture 34 …), c’est pour mieux en tirer la sève. L’efficacité n’est pas dans la durée, mais dans la recherche sonore. On expérimente, certes, mais ce n’est pas une expérimentation qui résulte dans des choses savantes. Y a même un côté animal et viscéral dans cet album, encore plus que dans The Seer.

To Be Kind est vraiment l’expression la plus poussée et la plus brillante (dans tous les sens du terme) de Swans depuis leur formation, et arrivent à synthétiser toutes leurs expériences, des plus radicales aux plus accessibles. Y a des aspects qui font penser aux premiers albums plus industriels du groupe dans des morceaux comme Oxygen, l’aspect plus éthéré de leur Soundtracks for the Blind se retrouvent dans Just a Little Boy, hommage des plus vibrants au bluesman Howlin’ Wolf, les accents folk que Swans intégrait depuis leur reformation sont également présent dans les moments les plus calmes de cet album, comme Some Things We Do … et tout cela sans aucun temps mort.

La tension qui se dégage de cet album n’est finalement pas si opressante que dans The Seer, elle est plus annonciatrice d’une transe que l’on ne peut contrôler. Notamment dans l’incroyable Bring The Sun/Toussaint L’Ouverture, monumentale pièce de 34 minutes aux accents tribaux, ou She Loves Us !, encore, qui distillent des sonorités épiques à souhait, et dans un torrent de son tellement enivrant qu’il est difficile d’en réchapper de manière apathique.

To Be Kind est un disque sans concession, radical, mais pas si misanthrope que ça, car les sensations qu’il dégage sont finalement plutôt humaines, discernables, et appréciables. Du moins je l’espère. Même si les durées des morceaux sont évidemment un élément exigeant, To Be Kind n’est pas spécialement prise de tête. C’est un album viscéral, presque organique, qui a une sonorité puissante exécutée avec un brio rare …

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